Nous vous l’avions annoncé : du 22 au 26 janvier, e-graine a eu la chance de participer au Forum Mondial sur la Migration et le Développement (FMMD) qui s’est tenu à Genève. Cet espace de rencontre informel entre États, organisations de la société civile, entreprises, autorités locales et jeunesses constitue l’un des seuls rendez-vous annuels pour parler migration et développement au niveau mondial. 

Pour mieux comprendre les enjeux du Forum Mondial sur la Migration et le Développement (FMMD), retrouvez notre précédent article : En route vers le Forum Mondial sur les  Migrations et le Développement.

Les discours sur la migration comme nouvelle préoccupation mondiale
La France, qui présidait cette édition du FMMD, a voulu mettre la priorité sur six enjeux forts et actuels tels que “Climat et mobilité humaine” ou “Le rôle des diasporas”. Mais la priorité qui a fait son apparition pour la première fois dans cet espace et qui a suscité beaucoup de discussions est : “La place de la migration dans les mentalités collectives à améliorer : récits, culture, émotion et rationalité”.

Ce thème, qui articule des réflexions autour de la nécessité de construire des récits plus informés et responsables et de trouver comment les transmettre, fait directement écho au travail d’éducation aux migrations entrepris par les associations e-graine en France. C’est cette expérience qui  nous a permis d’être invités à ce Forum en tant qu’un des seuls (ou le seul?) acteur éducatif présent sur la question des migrations.

Changer les narratifs sur la migration : la nécessité d’une coopération multi-acteurs
Engagée à déconstruire les préjugés les plus courants sur les migrations, e-graine œuvre toujours en coopération et tenait pendant ce Forum à nouer ou renforcer des liens avec l’écosystème des acteurs de (l’éducation aux) migrations au niveau international : gouvernements, recherche, secteur privé, collectivités et ONG. En effet, promouvoir des discours plus informés et responsables sur les migrations nécessite la coopération de beaucoup d’acteurs complémentaires et donc la structuration d’écosystèmes. Le même constat a émergé des discussions des autres délégués de la société civile, qui ont présenté des solutions pour embarquer médias, recherche, ONG et autorités locales dans la formulation de discours alternatifs, notamment lorsque les obstacles sont nombreux pour coopérer au niveau étatique.

Il manque encore d’espaces pour pouvoir faire commun sur ces enjeux. En ce sens, e-graine organisera en 2027 le premier forum national de l’éducation aux migrations (dans le pays qui a lancé la réflexion au niveau mondial sur ce sujet) afin de réunir tous les acteurs engagés pour la promotion de discours plus informés et responsables sur la migration et les personnes migrantes.

D’ores et déjà, de nombreuses initiatives portées à travers le monde ont nourri les débats pour voir comment dépasser le discours “Nous versus Eux”, donner la parole aux premier·es concerné·es, comment allier données et histoires humaines, promouvoir les apports de la diversité en termes de cohésion sociale, ou encore favoriser les rencontres interculturelles autour de la cuisine ou du sport (voir la campagne ITAC, Un Solo Rumbo en Equateur, musée de l’immigration en Australie, Welcome Corps aux Etats-Unis…).

Changer les discours par les médias et la communication… Qu’en est-il de l’éducation ?
Le rapport réalisé pour le FMMD “Une perspective mondiale sur les attitudes du public envers l’immigration : de la description à l’explication à l’intervention” focalise l’analyse sur le rôle des discours médiatiques dans l’influence des attitudes des populations envers les personnes migrantes. En effet, de nombreuses études montrent comment les discours tenus dans les médias affectent grandement nos perceptions. Ceci explique pourquoi des organisations comme l’OIM (Organisation Internationale Pour les Migrations) ou le PNUD (Programme des Nations unies pour le développement) ont investi ce champ depuis plusieurs années.

Cependant, le rapport présente également l’éducation comme le facteur le plus déterminant dans la formation des attitudes des enfants envers autrui. Il est donc possible de jouer sur ce facteur afin de changer les attitudes du public envers les personnes migrantes. C’est ce constat, qui constitue la base de notre travail de terrain pour faire de l’éducation aux migrations, que nous avons défendu auprès d’acteurs divers lors de tables-rondes sur la question des narratifs. Notre Responsable des programmes et projets nationaux Nathalie Porte est ainsi intervenue sur un événement parallèle (voir l’article dédié en anglais ici) pour présenter nos projets à plus de 50 acteurs et actrices de la migration du monde entier. Enfin, nous avons rejoint d’autres associations pour rappeler la nécessité de mesurer les effets de nos projets d’éducation aux migrations afin de faire la preuve de notre impact et de porter un message politique et social d’autant plus fort.

Si ces enjeux éducatifs étaient absents du programme du FMMD, force est de constater que tous nos interlocuteur·ices – acteur·ices gouvernementaux, académiques, de la société civile etc. – ont confirmé le besoin de sensibilisation et d’éducation aux questions migratoires. Une belle reconnaissance qui fait écho à la journée internationale de l’éducation qui s’est tenue en parallèle le 24  janvier.

Après cette semaine en territoire suisse, e-graine est rentré galvanisé des aspirations mondiales pour un sujet que nous investissons depuis cinq ans déjà avec notre programme d’éducation aux migrations. Ainsi, nous continuerons en 2024 à déployer des actions dans les territoires, à mobiliser les personnes concernées, les citoyen·nes et les jeunes de tous milieux pour promouvoir ensemble l’éducation aux migrations comme levier de solidarité.

Lisa Motzig
Chargée de plaidoyer
Union des associations e-graine