Les migrations internationales sont l’un des enjeux majeurs du 21ème siècle qui peinent, à la différence du changement climatique ou du défi énergétique, à être considéré comme tel. Pourtant, des réactions au phénomène s’organisent à toutes les échelles. Au niveau européen, des politiques migratoires de plus en plus restrictives reflètent une montée des populismes dans plusieurs pays. Les politiques d’immigration viennent alors répondre à des électorats plutôt qu’à des problèmes. En ce sens, les derniers grands événements marquant le territoire européen – crise migratoire de 2015, crise du Covid-19, guerre en Ukraine – n’ont été qu’autant d’occasions de fermer les frontières et d’encourager le repli sur soi, allant à l’encontre des principes fondateurs de l’Union européenne. 

Le contexte français témoigne des mêmes dynamiques contradictoires. Dans un pays où la part d’immigrés dans la population est stabilisée depuis plus de vingt ans autour de 11% (Héran, 2023), les discours politiques sur l’immigration se durcissent sur l’ensemble de l’échiquier politique. Les dernières élections présidentielles ont cristallisé les tensions autour des migrations pour en faire un sujet politique central, abordé plus souvent sous l’angle sécuritaire qu’humanitaire. Le projet de loi asile et immigration qui sera débattu au Parlement à l’automne 2023 n’en est que la dernière illustration. 

De plus, alors que les travaux de recherche sur le phénomène migratoire se multiplient, ils peinent à atteindre les citoyens. En témoigne la constante dominante des termes négatifs dans le traitement médiatique de ce sujet conduisant à un décalage profond entre les résultats de la recherche et l’ignorance dans laquelle le public continue de se trouver cantonné. Cet écart est d’autant plus frappant que le traitement médiatique du sujet migratoire est majoritairement rythmé par l’actualité des drames de la migration irrégulière (sans traiter des causes profondes ni des enjeux des migrations). En outre, il s’accompagne d’une montée de la désinformation et d’une banalisation d’opinions xénophobes dans des sphères diverses (sphère publique, sphère médiatique, réseaux sociaux…). Ainsi, 85% des Français pensent à tort que le nombre d’étrangers vivants en France a augmenté ces cinq dernières années (Etude Destins communs, 2017). En parallèle, le Défenseur des Droits révèle que plus d’un million de discriminations à caractère raciste ou antisémite piétinent chaque année notre contrat social tandis que le Rassemblement National est désormais considéré comme le plus stable du paysage politique français, en particulier pour les jeunes. 

Conscientes des enjeux à l‘œuvre, des institutions et organisations de la société civile sont déjà mobilisées pour faire face à ces dynamiques. En ce sens, les dernières orientations de la Diair (Délégation interministérielle à l’accueil et à l’intégration des réfugiés) ou de la DILCRAH (Délégation Interministérielle à la Lutte Contre le Racisme, l’Antisémitisme et la Haine anti-LGBT) témoignent d’une attention particulière pour les regards portés sur les publics migrants ou les discriminations liées à l’origine. 

Il semble évident que les migrations sont un phénomène inhérent aux sociétés humaines qui n’est pas voué à cesser dans les prochaines années. A l’inverse, les discours, réactions et politiques sur le sujet ne sont pas immuables, et il ne tient qu’à nous – au regard de ce contexte et en préparation des prochaines échéances électorales européennes et nationales – de poursuivre les initiatives déjà portées pour montrer une autre voie possible et faire renaître le sentiment d’appartenance à notre humanité commune.

C’est donc ancré dans cette perspective, conscient des enjeux français comme européens, que le programme Un Univers Citoyen œuvre chaque jour à transformer les représentations des migrations. Les projets de sensibilisation et de mobilisation sont ainsi portés par des associations, chercheur.ses, fondations, partenaires et citoyen.nes dans une dynamique multi-actrice qui prône une éducation aux migrations pour faire grandir un sentiment d’appartenance à une humanité commune.

Lisa Motzig
Chargée de plaidoyer et communication